Face au projet scandaleux du Rassemblement National de rouvrir les maisons closes, la CGT réaffirme son engagement abolitionniste et exige des moyens pour la sortie de la prostitution.
La CGT a pris connaissance avec la plus grande indignation des déclarations du député du Rassemblement National (RN), Jean-Philippe Tanguy, préparant une proposition de loi visant à « rouvrir les maisons closes » sous couvert d’un modèle « coopératif » . Cette initiative réactionnaire, qui prétend répondre à la précarité par la marchandisation institutionnalisée des corps, constitue une régression sociale et idéologique majeure. Elle s’attaque frontalement au modèle abolitionniste porté par la loi de 2016, que la CGT défend.
La CGT, organisation féministe et de lutte des classes, dénonce avec la plus grande fermeté ce projet et rappelle son engagement historique pour l’abolition du système prostitutionnel, pour la protection des personnes prostituées et pour une société débarrassée de cette violence patriarcale.
Rappelons que 85% des personnes en situation de prostitution sont des femmes et des filles, 10% sont des hommes, 5% sont des personnes trans et que l’âge moyen d’entrée en prostitution est de 14 ans ! C’est aussi un marché très lucratif, estimé à 3,2 milliards d’euros par an en France, qui montre les liens entre capitalisme et patriarcat.
1. Le mirage dangereux des « coopératives » : une réglementation qui ne dit pas son nom
Le RN tente d’habiller son projet libéral et régressif d’un vernis d’émancipation, évoquant des lieux « tenus par les prostituées elles-mêmes ». Ce discours est un leurre. L’expérience des pays ayant choisi la réglementation, comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, est un échec cuisant : elle n’a conduit qu’à une augmentation de la traite des êtres humains, de la prostitution des mineurs et n’a en rien amélioré les conditions de vie des personnes prostituées .
Par ailleurs, « installer » les femmes prostituées dans dans maisons closes, reviendrait à les invisibiliser, elles et les violences sexistes et sexuelles qu’elles subiront.
Présenter la prostitution comme une « activité coopérative » ou un « travail », c’est nier sa réalité fondamentale : la prostitution est une violence et une des expressions les plus aiguës de la domination masculine. C’est accepter la création d’un salariat de seconde zone, dépourvu des protections les plus élémentaires (santé, sécurité), où la personne est entièrement marchandisée. La CGT défend une conception du travail émancipatrice, qui ne saurait inclure l’exploitation sexuelle des femmes et de leur corps à des fins capitalistes.
2. La pénalisation des clients : un pilier essentiel pour renverser le rapport de force
Le député RN critique la loi de 2016, arguant qu’elle a « aggravé la situation » en poussant la prostitution dans la clandestinité. Ce discours reprend les éléments de langage des lobbies libéraux du «travail du sexe » qui prônent la liberté de se prostituer comme découlant de la liberté d’entreprendre totalement consenti en niant la réalité de la violence, des tortures et des traites d’être humain inhérentes au système prostitutionnel.
La CGT rappelle que la pénalisation de l’achat d’actes sexuels est un volet essentiel de la loi abolitionniste. Comme l’a réaffirmé la Cour Européenne des Droits de l’Homme en juillet 2024, cette mesure constitue un ensemble cohérent visant à renverser le rapport de force en faveur des victimes et à lutter contre les stéréotypes sexistes. La violence est inhérente au système prostitutionnel, pas à la loi qui cherche à le combattre.
3. L’urgence : appliquer et renforcer la loi abolitionniste de 2016
Le problème n’est pas la loi, mais son application à la marge et le manque criant de moyens alloués par les pouvoirs publics. La CGT dénonce régulièrement les manquements de l’État en direction des associations et des femmes qu’elle défendent et représentent. Un rapport récent des associations de terrain (FACT-S) montre que là où la loi est pleinement mise en œuvre, elle est efficace : elle a déjà permis à 2 000 personnes d’entamer un parcours de sortie, avec des résultats concrets en matière d’emploi et de régularisation.
4. Le silence complice du gouvernement est inacceptable
Alors que le Ministre du Travail, interrogé sur France Inter à ce sujet ce 9 décembre, explique qu’il n’y aurait pas de réponse simple à donner, nous lui rétorquons qu’il existe une réponse légale, et qu’en sa qualité de ministre du Travail, il lui incombe de ne pas déroger à la loi.
La CGT exige que le gouvernement, par la voix de ses ministres concernés, condamne sans ambiguïté ce projet et s’engage publiquement.
Garantir l’application intégrale de la loi de 2016 et débloquer les financements nécessaires pour les associations d’accompagnement, refuser toute légalisation ou réglementation de la prostitution, quel que soit le modèle proposé (assistance sexuelle aux personnes handicapées, maisons closes, auto entreprenariat…) et mettre en œuvre une politique sociale ambitieuse pour lutter contre le proxénétisme des femmes et des jeunes filles.
La CGT défend un projet de transformation sociale. Elle lutte pour une société égalitaire, débarrassée de toutes formes d’oppressions, de violences et de dominations.
Le corps des femmes n’est pas et ne sera pas à disposition de clients proxénètes. Le corps des femmes ne sauraient être un terrain d’expérimentation de politiques néolibérales, de projets d’uberisation ou de politiques fémonationalistes.
Encore une fois, le RN démontre son imposture sociale quant aux questions de droits des femmes.
La CGT appelle l’ensemble des organisations syndicales, associatives, politiques et tou-tes les citoyen-nes progressistes à se mobiliser pour faire échec à ce projet rétrograde. Nous ne transigerons pas sur les principes d’égalité, de dignité et d’émancipation. La prostitution n’est pas une fatalité, encore moins un travail. L’abolition est un combat social et féministe que nous mènerons jusqu’au bout.
