Février 2011, le scandale explose. Suite à une énième brimade de son chef de section, une technicienne EDF aux « Logistiques moyens », révèle aux représentant.es CGT en CHSCT des faits de harcèlement dont elle est victime depuis de nombreux mois.
Par la suite, d’autres témoignages affluent, plusieurs victimes d’entreprises sous-traitantes se déclarent. Des faits perpétrés au début des années 2000 à l’encontre d’une toute jeune femme de ménage saisonnière à la Centrale ressurgissent également.

Les élu.es CGT prennent la mesure de la gravité de la situation et se rapprochent de leur syndicat et de l’Association AVFT (Association européenne Contre les Violences faites aux Femmes au Travail), très investie dans ce domaine. Oui, il s’agit bien de faits qui pourraient être qualifiés de harcèlement moral et sexuel, par le comportement inadapté de ce cadre qui pourrait être qualifié de prédateur, pervers narcissique.
Les élu.es CGT informent le directeur de la Centrale qui saisit l’Inspection du Travail. Une enquête est réalisée sur place dont les conclusions sont restituées lors d’un CHS-CT extraordinaire en mars 2011. Les faits relevés constituent des infractions aux articles L1152.1 (harcèlement moral) et 1153.1 (harcèlement sexuel) du Code du Travail.
Par conséquent, il est demandé à l’employeur, en application de l’article L4121.1 du Code du Travail, de faire cesser ce trouble manifeste et il est demandé que le cadre n’exerce plus de fonction sur le site de la Centrale EDF de Porcheville.
Le cadre est sanctionné d’une mutation à 70 kms de son domicile, dans un poste dorénavant sans subordonné.

EDF CONDAMNEE AUX PRUD’HOMMES

L’employeur ayant failli à ses obligations de protection de la salariée, la technicienne EDF demande réparation auprès du Tribunal des Prud’hommes de Mantes-la-Jolie. En juillet 2014, en s’appuyant sur l’enquête de l’Inspection du Travail ainsi que de nombreuses pièces matérialisant des agissements répétitifs constitutifs de harcèlement moral et sexuel, les Prud’hommes condamnent EDF au versement d’une indemnité à la victime pour dommages et intérêts. EDF se désistera de la procédure en appel.
La victime tient bon et malgré la souffrance engendrée elle engage une procédure au pénal à l’encontre de son chef de section. Une longue procédure qui aboutit à une audience devant le Tribunal correctionnel de Versailles le 5 octobre 2021. Durant cette audience de plus de 2h30, de nombreux témoignages étayent les propos de la plaignante et révèlent le comportement du cadre.

Pour sa défense, le prévenu reconnaît le fait d’une altercation avec la technicienne qu’il a enfermée à clé dans son bureau pour une « explication musclée ». Cette situation est vécue par la victime comme un « passage à tabac » verbal.
Le prévenu a également été confronté au témoignage écrit d’une salariée du restaurant d’entreprise se plaignant de son comportement inadmissible. Il dit au contraire qu’il s’agissait d’une relation amoureuse consentie d’autant plus qu’elle a duré 4 ans. Cette salariée, reconnue victime lors de l’enquête de l’Inspecteur du Travail, dément formellement.
Le prévenu affirme que tout ce dont on l’accuse ne serait que mensonges et complot… ourdi par la CGT !!! Un prévenu qui crie au mensonge alors qu’il invente une relation amoureuse consentie et qui ne se gêne pas de mentir au Président du Tribunal en minorant son niveau de rémunération !!!
L’audience met en lumière la descente aux enfers subie par la victime avec une dégradation de sa santé physique et mentale causée par les agissements du cadre. La victime a été reconnue souffrante d’un syndrome post traumatique sur la base d’une expertise psycho judiciaire.

LE CADRE CONDAMNE EN CORRECTIONNEL

En fin de journée, le Tribunal rend une décision qui dépasse les réquisitions du Procureur. Le cadre, reconnu coupable, est condamné à une peine de 8 mois de prison avec sursis et au versement de 20 000 euros d’indemnisation pour la victime. Le condamné devra également s’affranchir d’un euro de dommage ainsi que de 1 000 euros de frais de justice au bénéfice de la CGT, partie civile.
C’est un encouragement à toutes les femmes pour briser le silence et dénoncer le harcèlement et les violences quotidiennes qu’elles subissent sur leur lieu de travail (En France, 32 % des femmes ont déjà subi du harcèlement sexuel au travail). C’est aussi un encouragement à toutes et à tous les militant.es syndicaux sur le terrain à se tenir aux côtés des victimes pour fissurer les remparts du patriarcat et l’omerta qui couvrent trop souvent ce genre d’affaire.
On ne peut également que déplorer la lenteur judiciaire qui alourdit le fardeau à supporter pour les victimes.
Le condamné n’ayant pas fait appel au terme du délai légal de 10 jours, le jugement est donc exécutoire.

Syndicat du personnel et de la production et du transport d’energie de la région parisienne – SPPTE-RP-FNME